Le droit de culpabiliser

« Quand je dis que je suis fatiguée, on me ramène toujours à mes enfants ... "Tu les as voulu, tu assumes!" »

Et si on sortait un peu de ces discours culpabilisants et on voyait les choses autrement ?! J'ai suivi de nombreux parents qui n'osaient plus rien dire de leurs souffrances, de la fatigue ou seulement du fait de vouloir un peu se plaindre de temps en temps. Pourquoi ? Simplement parce que quand ils parlaient autour d'eux, le seul retour qu'ils avaient était « Tu ne vas pas te plaindre quand même, tu les as voulu tes enfants, alors tu assumes ! » Assumer quoi au juste? 

Parce que le fait d'être fatigué, de ne plus en pouvoir ou simplement d'être énervé n'est pas légitime du fait qu'ils ont voulu avoir un enfant ? 

Et si on prenait un peu de recul et qu'on voyait les choses autrement... Prenons un homme de 30 ans, il vient d'arriver dans une ville où il ne connait personne et même dans un autre pays, il démarre un nouveau travail qui lui plaît beaucoup mais il doit travailler énormément parce qu'on lui demande des choses qu'il ne savait pas encore faire auparavant. Quand il parle à ses amis, qu'il explique sa nouvelle, sa nouvelle situation, le fait que c'est difficile d'arriver dans un pays qu'on ne connaît pas, dont on ne connait pas les codes. Qu'il est un peu perdu avec tout ça et donc qu'il est fatigué. Pour autant ça n'enlève en rien le fait qu'il ADORE cette nouvelle vie, la ville lui plaît, le travail l'épanouit mais il doit bien avouer qu'il est EPUISÉ... Dans ce cas là lui dirait-on « Tu ne vas pas te plaindre quand même, tu l'as voulu, alors tu assumes ! » ? 

Est ce que parce qu'on a voulu quelque chose, il est normal que l'on subisse les retombées ? Personnellement, je suis persuadée que non. La société est telle qu'elle nous a longtemps fait croire que nous devions nous taire, accepter et que de toute façon, tout le monde subissait alors pourquoi déroger à la règle ? Je me souviens de ma grand mère qui m'avait dit un jour « Tu sais, moi aussi je me suis disputée avec ton grand père, je n'étais pas d'accord mais c'est comme ça et pas autrement. Je me suis tut et j'ai continué avec lui, tant pis, c'est comme ça. » Cela m'avait interpellé. Car encore plus loin que les enfants, cela voulait dire que nous devons taire nos sentiments et nos émotions et ce peut importe la situation. 

Alors finalement je me pose une réelle question, pourquoi toujours pousser à juste taire les souffrances, les émotions dites négatives ? Là encore me vient une réflexion, est ce parce que sur internet, sur les réseaux notamment, il n'y a presque que le « beau » qui est montré ou même qui doit être partagé ? Parce que dès lors que quelqu'un ose dire un peu plus fort que ça ne va pas, il se fait insulté ou qu'on lui répond simplement que ça le regarde et c'est sa vie privée ? Mais alors, le beau n'est pas privé ? 

Je vois un bon nombre de personnes (parents ou non) juste sourire avec les yeux pleins de tristesse et répondre oui à la fameuse question « ça va? ». Parce qu'ils savent que si ils disent « non » alors ce sera eux le problème parce qu'ils l'ont voulu...

Je voudrais à ces hommes, à ces femmes, à ces pères, à ces mères qu'ils ne sont pas seuls. Vous avez le droit de parler de votre souffrance, vous avez le droit d'en avoir marre, d'être épuisés, de regretter même! Vous avez le droit de juste vous exprimez ! Et si vous ne savez pas vers qui vous tournez, alors n'hésitez pas à aller voir un professionnel. Médecin, psychologue, sage femme, gynécologue, doula, accompagnant à la parentalité, nous sommes tous là pour vous écouter!